Nous ne donnons aucun sujet d’achoppement à personne, pour que le ministère ne soit pas pris en défaut. Mais nous nous recommandons nous-mêmes, à tous égards, comme ministres de Dieu : par beaucoup d’endurance dans les détresses, dans les désarrois, dans les angoisses, sous les coups, dans les prisons, dans les désordres, dans les travaux pénibles, dans les veilles, dans les jeûnes ; dans la pureté, dans la connaissance, dans la patience, dans la bonté, dans l’Esprit saint, dans un amour sans hypocrisie, dans la parole de vérité, dans la puissance de Dieu ; par les armes offensives et défensives de la justice ; par la gloire et le déshonneur, par la mauvaise et la bonne réputation ; regardés comme imposteurs, quoique vrais ; comme inconnus, quoique bien connus ; comme mourants, et pourtant nous vivons ; comme châtiés, quoique non mis à mort ; comme attristés, quoique toujours joyeux ; comme pauvres, alors que nous faisons beaucoup de riches ; comme n’ayant rien, quoique possédant tout.
(2 Co 6:3-10)
Explications
Le ministère de Paul se veut irréprochable. C’est sûrement cette motivation qui l’a poussé à ne pas demander d’argent pour ce service (8:20, 11:7). Paul montre ainsi bien que ce qu’il fait, il ne le fait pas pour lui ou pour sa gloire, mais pour le service des autres et pour Dieu.
Comment comprendre cette phrase qui débute par “nous nous recommandons nous-mêmes …” après avoir lu, par exemple, en 5:12 “Nous n’allons pas de nouveau nous recommander nous-mêmes” (voir aussi 3:1 mais aussi 8:12, 17) ?
Il apparaît assez clairement que ce thème (Paul et ses compagnons qui se recommandent eux-mêmes ou qui justifient leur ministère) est cher à Paul dans cette lettre. Peut-être étaient-ils victimes, de la part de certains ennemis, d’une accusation de se vanter ou, au contraire, de faire preuve de faiblesse ?
Paul va, en tout cas, introduire ici une argumentation contre-intuitive. Il est attendu qu’une personne importante justifie son importance : “voici ce que j’ai fait pour mériter mon rôle ou mon influence : …”. Mais Paul, ici, va faire une liste inattendue de façons de décrire leur service (ministère) qui est déshonorante aux yeux des hommes, mais qui est validée par Dieu et l’Esprit Saint.
L’argumentation sous-entendue est donc : “Ok, vous voulez des raisons de valider notre ministère ? Les voici.”
Quelle est alors cette liste ?
D’abord, des situations difficiles, voire extrêmes : souffrances, détresses, angoisses, coups, prisons, émeutes, travaux pénibles, privations. Allons-nous vraiment faire confiance à une personne qui est mal vue par la société ?
Ensuite, des qualités qui ne sont pas des qualités typiques d’hommes conquérants, mais des qualités d’humilité : pureté, connaissance, patience, bonté, amour, vérité, puissance de Dieu, justice, dans toutes situations. Allons-nous vraiment suivre et accepter l’autorité d’une telle personne ?
Enfin, différentes façons d’être vus par les autres, en mettant en avant des contrastes forts. D’un côté (aux yeux de certains), ils sont vus comme imposteurs, inconnus, mourants, condamnés, attristés, pauvres et n’ayant rien. Alors que, de l’autre côté, ils sont (aux yeux de Dieu, aux yeux de la vérité) honnêtes, connus, vivants, libres, joyeux, enrichissant les autres et possédant tout. Comment allons-nous, à notre tour, décider de considérer Paul ?
Commentaires
D’une part, l’image que Paul donne de lui-même et de ses compagnons est à l’image du Christ.
Il est intéressant de noter que Paul s’est senti obligé de se défendre ainsi, c’est-à-dire de rappeler aux Corinthiens que la victoire et la puissance de Dieu ne sont pas dans la gloire des hommes mais dans l’humilité et la faiblesse. Auraient-ils oublié que leur Seigneur a été crucifié comme un moins-que-rien ?
Mais, finalement, pouvons-nous vraiment leur jeter la pierre ? Combien de fois, nous aussi, oublions-nous de regarder à la croix ? Combien de fois confondons-nous la puissance de Dieu avec une certaine gloire terrestre ? Combien de fois oublions-nous que Jésus a promis à ses disciples qu’ils seraient rejetés par le monde (Jn 15:19, 16:33) ?
L’exemple de Paul nous appelle à l’humilité et nous redirige vers notre Seigneur, le Christ, qui est à la fois le glorieux ressuscité qui nous accueille dans la nouvelle vie, mais aussi l’humble crucifié qui nous rappelle que le monde ne l’a pas accueilli et ne nous accueillera pas.
D’autre part, toute cette argumentation de Paul m’amène à me demander : comment vois-je mon succès dans la vie (mon travail, mon service à l’église, ma famille, …) ? Avec quelle mesure puis-je juger mes actions et mon service pour Dieu ?
Comment cherchons-nous à convaincre les autres ? Avec un titre ? Avec un succès humain ? Paul, ici, n’a pas succombé à la tentation de dire tout ce qu’il a fait de beau aux yeux des hommes, qui pourrait justifier que les Corinthiens devraient l’écouter, mais il profite de cette argumentation pour leur montrer que c’est plutôt par les souffrances et les faiblesses qu’il se justifiera.
En conclusion, pourquoi servir ? Qu’est-ce qui motive ce que je fais pour les autres ? Est-ce pour la reconnaissance que j’espère recevoir ? Est-ce pour de grandes responsabilités que j’aimerais assumer ? Est-ce pour une influence ou une notoriété ?
Paul, lui, cherche à servir pour le bien des autres, et ne cherche à être un obstacle à personne. Comme le Christ, il sert par amour seulement.
À retenir
- La seule gloire que l’on devrait rechercher est la gloire de Dieu.
- Notre service aux autres devrait seulement être motivé par notre amour, pas par un quelconque gain.
- Mt 6:2 : “Quand donc tu fais un acte de compassion, ne sonne pas de la trompette devant toi, comme les hypocrites le font dans les synagogues et dans les rues, afin d’être glorifiés par les gens. Amen, je vous le dis, ils tiennent là leur récompense.”
